Un vent de changement

2016-02-10 03:07
中国与非洲(法文版) 2016年9期

Un vent de changement

DE toute évidence, les seules personnes surprises par les résultats des

élections municipales en Afrique du Sud en août étaient les membres et les dirigeants du parti au pouvoir, le Congrès national africain, ou ANC (African National Congress). Pour la première fois depuis son arrivée au pouvoir en 1994, la base électorale de l'ANC est tombée en dessous des 60 %. Le mécontentement des électeurs du parti des grandes figures de la lutte contre l'apartheid, comme Oliver Timbo et Nelson Mandela,est évident.

L'ANC a perdu de nombreuses municipalités, mais les plus grands revers sont la perte des grandes municipalités de Nelson Mandela, Bay et Tshwane, comprenant la capitale administrative du pays, Pretoria, et la perte de Johannesburg, un changement autrefois inimaginable dans l'Afrique du Sud dirigée par l'ANC. Pour gouverner ces zones, les partis d'opposition ont choisi de créer des alliances multipartites menées par l'Alliance démocratique (DA), et influencées par les Combattants pour la liberté économique(EFF), qui connaissent une ascension fulgurante.

L'Alliance démocratique garde le contrôle du Cap. Son dirigeant, Mmusi Maimane,est persuadé que ces élections constituent un « point de rupture » pour le peuple sudafricain. Plusieurs raisons expliquent le mécontentement des électeurs : le manque de services de base, notamment l'eau, le ramassage des ordures et l'électricité ; un taux de chômage avoisinant les 25 % ; et les incessants scandales de corruption qui minent le parti au pouvoir et plus particulièrement le Président Jacob Zuma, à la tête du pays depuis 2009.

Toutefois, malgré la baisse de soutien à laquelle doit faire face l'ANC, le Président Zuma continue de bénéficier d'un large soutien dans les zones rurales, ainsi qu'au sein de son parti. Les dirigeants du parti refusent de rejeter la faute de cette défaite sur le Président et les scandales de corruption qui l'entourent, et affirment assumer collectivement la responsabilité pour ces résultats. Selon le Daily Maverick, le Président sudafricain aurait tenté de rassurer le Comité exécutif national de l'ANC en les poussant à réévaluer les 53,9 % de soutien populaire. Ce score ne serait pas une défaite, puisqu'il s'agit du double de ce qu'a obtenu l'Alliance démocratique, parti d'opposition.

Alors que les dirigeants du parti tentent de faire bonne figure, certains observateurs lisent entre les lignes : « Face à ces mauvais résultats, une bataille au sein du parti pourrait voir le jour. L'ANC devrait alors trouver une sortie honorable pour Zuma », expliquait à l'Agence France Presse l'analyste politique indépendant, Daniel Silke. La sortie en question fait évidemment référence aux élections présidentielles de 2019. Alors que le deuxième mandat du Président Zuma arrive à son terme, l'ANC doit faire face à de nombreux défis pour rétablir la confiance autrefois inébranlable de ses partisans. Le parti devra inévitablement se remettre en question. Malgré le soutien au Président, cette nécessité est reconnue par les dirigeants du parti, qui savent que l'ANC doit désormais penser à son avenir.

Zizi Kodwa, porte-parole de l'ANC, affirmait que le parti voulait reconnecter avec le peuple sud-africain et travailler pour changer l'image du parti, souvent perçu comme arrogant, corrompu, et instable. Alors de nombreuses mesures sont annoncées pour redynamiser la structure du parti et regagner la confiance des partisans, personne n'ose parler du problème que représente Jacob Zuma pour la formation politique. Son maintien risque-t-il d'aliéner davantage d'électeurs ? Quoi qu'il en soit, un vent de changement souffle avec force sur la politique sud-africaine.