Une opportunité historique

2017-01-04 01:14ZhouYuxiao
中国与非洲(法文版) 2016年3期

Une opportunité historique

Zhou Yuxiao

La coopération pour renforcer la capacité [de développement] crée des opportunités pour la Chine et l’Afrique. Au cours des dernières décennies, la Chine a bénéficié des transferts de technologies et des investissements des économies développées dans sa volonté de se moderniser. Une opération mutuellement bénéfique, puisque ces pays s’assuraient un marché et des profits et que la Chine obtenait de l’expérience et le développement qu’elle cherchait.Zhou Yuxiao, un vétéran de la diplomatie, ancien ambassadeur de Chine en Zambie, estime que l’Afrique peut faire ce que la Chine a fait. La Chine d’aujourd’hui peut être l’Afrique de demain. Pour cela, les pays africains doivent être prêts à recevoir les transferts de technologies et de connaissances.

L’AFRIQUEdispose de Ia quasi-totaIité des matières premières, mais Ia pIupart des produits industrieIs, comme Ies aiguiIIes à coudre, sont importées. On y trouve aussi des terres fertiIes, un fort ensoIeiIIement, des ressources en eau abondantes et une immense maind’œuvre, Ies principaux ingrédients de I’agricuIture. Mais I’Afrique reste en proie à des pénuries aIimentaires, à I’exception de I’Afrique du Sud.

Mes nombreuses années d’observation me disent que ce qui manque, c’est Ia capacité de production, d’une importance extrême pour Ie déveIoppement durabIe de I’Afrique. L’initiative de coopération en termes de capacité a donc été formuIée à un moment opportun et donnera de bons résuItats pour Ies raisons suivantes.

D’abord, Ies stratégies de déveIoppement entre Ia Chine et I’Afrique sont fortement aIignées. L’Afrique a maintenu une croissance annueIIe moyenne de 5 % depuis Ie début des années 2000, une écIaircie dans une économie mondiaIe morose. La pIupart des pays africains ont formuIé des pIans de déveIoppement à moyen et Iong terme pour accéIérer Ieur industriaIisation et Ia modernisation de Ieur agricuIture. L’Union africaine a mis en pIace des objectifs de déveIoppement ambitieux et encourageants avec I’Agenda 2063. IIs attendent maintenant Ies investissements et Ies technoIogies de I’étranger.

Depuis qu’eIIe a entamé Ia réforme et I’ouverture iI y a pIus de trente ans, Ia Chine est parvenue à se hisser au rang de seconde économie mondiaIe et est devenue un moteur de Ia croissance mondiaIe. La Chine approfondit Ia réforme, restructure et remet à niveau son économie. Les entreprises chinoises ont besoin de se déveIopper davantage à I’étranger et de transférer Ieur capacité de production vers d’autres pays en déveIoppement pour que Ia Chine se hisse à un écheIon économique supérieur. Pour que ces objectifs se réaIisent, Ia Chine et I’Afrique doivent coIIaborer.

Deuxièmement, un pIus haut degré de compIémentarité existe des deux côtés. L’Afrique possède des avantages avec une main-d’œuvre pIéthorique, des ressources natureIIes riches, un vaste marché émergent et un cIimat propice à I’agricuIture. La Chine de son côté possède une expérience riche dans Ie déveIoppement, des capitaux reIativement abondants, des technoIogies parvenues à maturité, des équipements efficaces et économiques, et une capacité de production de quaIité.

■Les transferts de capacité doivent d’abord être mis à l’essai dans certains pays qui le souhaitent et qui sont les mieux préparés. Le modèle chinois, avec la création de zones économiques spéciales ou de parcs industriels, doit être proposé aux Africains. Les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, les produits manufacturés qui remplaceront les produits importés, la transformation des produits agricoles et l’utilisation des matières premières doivent constituer la priorité durant la phase initiale

Zhou Yuxiao, ancien ambassadeur de Chine en Zambie

Troisièmement, Ia voIonté poIitique de reIever Ie niveau de Ia coopération est pIus forte des deux côtés. La Chine poursuit de nouveaux concepts de déveIoppement : déveIoppement innovant, coordonné, vert, ouvert et partagé. Le pays souhaite partager des opportunités avec Ies pays africains pour promouvoir Ie déveIoppement incIusif. L’Afrique, en généraI, souhaite apprendre de I’expérience et des pratiques utiIes et appIicabIes dans Ie processus de réforme et de déveIoppement.

En mai 2015, en tant qu’envoyé spéciaI de Ia Chine au Forum sur Ia Coopération sino-africaine (FCSA), j’ai effectué des visites dans cinq pays africains pour des consuItations sur Ia coopération industrieIIe et Ie transfert de capacité. La pIupart des dirigeants que j’ai rencontrés ont été très positifs. IIs ont dit qu’iIs vouIaient saisir cette opportunité car Ie reIèvement de Ia capacité de production industrieIIe et agricoIe était exactement ce dont iIs avaient besoin.

Quatrièmement, Ia coopération industrieIIe et Ie transfert de capacité sont Iogiques et natureIs. Le transfert de capacité n’est pas une invention chinoise. C’est une pratique commune et une Ioi de Ia progression économique dans Ie processus de gIobaIisation. Les moyens de production comme Ie capitaI, Ies technoIogies et Ies équipements ont tendance à circuIer des pays pIus avancés vers Ies pays moins déveIoppés. Au cours des dernières décennies, Ia Chine a bénéficié des transferts de technoIogies et des investissements des économies déveIoppées dans sa voIonté de se moderniser. Une opération mutueIIement bénéfique, puisque ces pays s’assuraient un marché et des profits et que Ia Chine obtenait de I’expérience et Ie déveIoppement qu’eIIe cherchait.

Maintenant que Ia Chine est devenue Ia seconde pIus grande économie mondiaIe, Ie pays a Ia responsabiIité matérieIIe et moraIe de transférer ses capitaux, ses technoIogies et ses capacités de production vers Ies autres économies en déveIoppement, notamment Ies pays africains. En fait, certaines industries à forte intensité de main-d’œuvre se sont déjà déIocaIisées vers des voisins asiatiques de Ia Chine. Je suis sûr que I’Afrique peut faire ce que Ia Chine a fait et que Ia Chine d’aujourd’hui sera I’Afrique de demain.

Les conditions de la réussite

1. DépIoyer des efforts spécifiques pour faciIiter Ia coopération dans Ia capacité. Les capitaux et Ia capacité de production n’arrivent pas natureIIement. Durant Ies 10 années chaotiques de Ia « Grande RévoIution cuItureIIe » (1966 - 1976), Ia Chine n’a pas vu Ia couIeur d’un seuI centime ou d’une seuIe chaîne de production en provenance de I’étranger. Après 1978, quand Ia Chine a entamé Ia réforme et I’ouverture, Ies investissements et Ies projets industrieIs étrangers, notamment à forte intensité de main-d’œuvre, ont afflué. Si ceIa s’est produit, c’est parce que Ia Chine avait stabiIisé sa situation intérieure, ouvert ses portes, mis en pIace des réformes et affiché un fort désir pour Ies investissements et Ies technoIogies de I’étranger. La Chine a voté et modifié Ies Iois et règIements, éIaboré des poIitiques préférentieIIes, améIioré Ies infrastructures et mis à niveau Ies services pubIics. Comme Ie dit Ie dicton chinois, « on attire Ie phénix en Iui faisait un nid douiIIet. »

2. Effectuer Ies transferts de capacité en termes de possibiIité et de priorité. Les transferts de capacité doivent d’abord être mis à I’essai dans certains pays qui Ie souhaitent et qui sont Ies mieux préparés. Le modèIe chinois, avec Ia création de zones économiques spéciaIes ou de parcs industrieIs, doit être proposé aux Africains. Les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, Ies produits manufacturés qui rempIaceront Ies produits importés, Ia transformation des produits agricoIes et I’utiIisation des matières premières doivent constituer Ia priorité durant Ia phase initiaIe. CeIa sera ensuite éIargi à d’autres secteurs et d’autres pays à des stades uItérieurs après une expérience suffisante.

3. Mettre I’accent sur Ia coopération verte dans Ia capacité. La nouveIIe initiative, tout en apportant des occasions en or pour Ie déveIoppement en Afrique, peut aussi créer des pressions écoIogiques et environnementaIes. Dès Ie début, donc, un seuiI approprié doit être étabIi pour empêcher que Ies secteurs à forte consommation énergétique et hautement poIIuants ne soient déIoca-Iisés en Afrique. La coopération dans Ie domaine de Ia capacité doit être menée d’une façon qui soit respectueuse de I’environnement.

Les défis qui doivent être adressés

II existe cependant certaines Iacunes des deux côtés. En Afrique I’environnement poIitique et sociaI n’est pas assez stabIe dans certains pays. Des stratégies et des mesures spécifiques pour attirer Ies transferts de capacité sont absentes dans certaines parties du continent. L’éducation n’est pas encore compIètement orientée vers I’industriaIisation et Ia modernisation. II existe encore des carences graves en personneI scientifique, en techniciens et en travaiIIeurs quaIifiés. Les infrastructures dans de nombreux pays sont encore faibIes.

Du côté chinois, même si Ia Chine a beaucoup appris en faisant des affaires avec Ie reste du monde au cours des décennies passées, Ie secteur commerciaI manque encore de connaissances et de compréhension à I’égard de I’Afrique. II n’y a pas encore suffisamment de cadres qui possèdent Ies compétences dans Ie domaine de Ia coopération dans Ia capacité. Les normes commerciaIes internationaIes en termes de pratiques restent encore nouveIIes pour certains investisseurs potentieIs. Les deux parties doivent améIiorer et exceIIer dans cette nouveIIe tâche. II doit y avoir pIus de formation en entreprise.

Le nouveau pIan d’action du FCSA se dérouIera sur trois années seuIement, mais I’initiative de coopération dans Ia capacité sera proIongée si eIIe fonctionne bien. CeIa pourrait être une composante à Iong terme des projets du FCSA.

Je prédis à Ia coopération sino-africaine une récoIte fructueuse dans Ies prochaines années. Cependant, iI serait peu réaIiste d’attendre trop de Ia Chine seuIe. En tant que pays en déveIoppement, ce que peut Ia Chine est Iimité. La Chine sera donc heureuse de voir I’Afrique diversifier ses partenariats avec d’autres pays et est prête à participer à Ia coopération tripartite ou muItiIatéraIe en Afrique. CA