Éducation :des échanges qui portent fruit

2018-07-20 01:22parIbrahimaThioub
中国与非洲(法文版) 2018年7期

par Ibrahima Thioub

Le domaine de l’éducation se révèle être une plateforme fertile d’échanges entre la Chine et le Sénégal

Des sessions de formation entre la Chine et le Sénégal sur différents sujets se sont multipliées ces dernières années.

La visite du Président Xi Jinping au Sénégal fait suite à la tenue du XIXeCongrès du Parti communiste chinois(PCC), qui s’est ouvert le 18 octobre 2017 sous le thème du « rêve chinois ». Au regard des dynamiques en cours dans le monde contemporain, on peut valablement affirmer que ce rêve chinois n’est pas une utopie, mais bien un objectif mobilisateur pour les horizons 2021 et 2049. Ce n’est donc point un hasard si le Sénégal et la Chine,avec respectivement le Plan Sénégal Émergent (PSE) et les objectifs du centenaire de la proclamation de la République populaire, ont le même horizon pour 2035. Cette convergence des horizons temporels fixés par les deux pays devra servir de boussole pour une coopération fructueuse et durable.

Ibrahima Thioub.

Aujourd’hui la Chine s’est imposée comme laboratoire du développement économique,social et culturel pouvant valablement inspirer les pays d’Afrique. La Chine s’est dotée d’un modèle éducatif inspiré de ses traditions et au cœur de la modernité. Ce modèle intègre la culture civique, les valeurs de la famille,l’humanisme, les vertus, les idées créatrices et la quête permanente des connaissances par la recherche. La loi sur l’éducation affirme le double ancrage de la Chine dans ses traditions historiques nationales et les valeurs universelles qui inspirent toute l’humanité.

C’est le sens que le Président Xi Jinping donne au soft power culturel de la Chine pour une éducation qui porte l’esprit national et le temps du monde et qui encourage chez les peuples partenaires leurs idéaux et croyances, tout en assurant l’essor des programmes et entreprises culturels.

Les principes qui guident la coopération chinoise affirment la fidélité à cet esprit en faveur de l’indépendance, l’égalité, le bénéfice et le respect mutuels. Comment ces principes généraux se traduisent-ils dans la coopération entre la République populaire de Chine et le Sénégal ? La solidarité semble être le maître mot d’une coopération qui comptabilise des décennies d’un partenariat à l’impact bien visible dans les différents secteurs de notre éducation nationale.

Construction et bourses

Ce partenariat entre la Chine et le Sénégal s’est particulièrement illustré dans la construction et la réhabilitation des infrastructures scolaires, de l’élémentaire,du secondaire et du supérieur. Ainsi, la carte scolaire du Sénégal compte bien des établissements construits et équipés par la République populaire de Chine.

Aujourd’hui la Chine s’est imposée comme laboratoire du développement économique,social et culturel pouvant valablement inspirer les pays d’Afrique.

Depuis la capitale Dakar, avec la restauration d’une école primaire à la Médina, la Chine a construit l’école de Tivaouane Peul,le Collège d’enseignement moyen de Ndiar avant d’aller au cœur du Cayor pour y bâtir deux écoles maternelles et restaurer l’École El Hadji Amadou Barro Ndièguene de Thiès.

De plus, la Chine est une championne dans l’octroi de bourses d’études et le financement de programmes de stages de perfectionnement pour les fonctionnaires et cadres sénégalais. De l’année 2005 à 2017, le gouvernement chinois a accordé à la partie sénégalaise un millier de bourses qui ont permis à plus de 300 étudiants sénégalais de poursuivre leurs études supérieures en Chine. L’année académique 2017-2018 a vu la Chine porter de 50 à 60 le nombre annuel de bourses en faveur des étudiants sénégalais. À cet effort remarquable s’ajoute l’important programme de bourses de Hanban qui permet aux étudiants sénégalais de faire des séjours de formation de 1 ou 2 semestres en Chine. Les choix s’opèrent à partir de critères de maîtrise de la langue et de la culture chinoises. Chaque année une vingtaine de bourses est proposée aux étudiants de l’institut Confucius de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD).

Il faut y ajouter la bourse MOFCOM pour des études de masters et de doctorats en Chine offerte depuis 2015 par le ministère chinois du Commerce. Ces bourses couvrent tout le spectre des formations classiques comme celles de pointe. Dans les grandes universités chinoises de Beijing, Xi’an et Xiamen, font légion les jeunes Sénégalais embrassant les domaines stratégiques de l’électronique, des hydrocarbures ou de la chimie organique, sans oublier la formation approfondie en langue et sinologie. Les arts martiaux et les techniques de bien-être ne sont pas en reste avec les spécialisations dans les pratiques médicales, le qigong ou le wushu, sans oublier la science environnementale.

L’institut Confucius :un fleuron

Le fleuron de la coopération chinoise en matière d’éducation reste sans conteste l’institut Confucius de l’UCAD. La vice-Première ministre chinoise Liu Yandong a bien défini la philosophie qui a présidé à la création des instituts Confucius. Il s’agit d’outils et de facilitateurs de la construction d’une communauté de destin pour toute l’humanité.Du reste, la constitution et le règlement des instituts Confucius l’ont clairement stipulé.Il s’agit de « renforcer les échanges éducatifs et culturels et la coopération entre la Chine et les autres pays, approfondir les relations amicales avec les autres nations et promouvoir le développement du multiculturalisme dans le monde ».

La mission des instituts Confucius se fonde sur trois principes directeurs : d’abord, diffuser la langue et la culture chinoise dans le monde ; ensuite, intégrer les cultures locales avec suffisamment d’ouverture pour en assimiler l’essence ; enfin, développer la coopération multiforme surtout dans le domaine de l’éducation et la culture.

L’institut Confucius de Dakar, il faut le noter, est au cœur du dispositif institutionnel de l’UCAD dont il traduit parfaitement les options d’ouverture, de professionnalisation et d’excellence. L’enseignement supérieur au Sénégal a été, en effet, marqué depuis les années 2000 par une expansion et une diversification remarquable de son offre pédagogique. Le contexte est marqué par l’augmentation de la demande d’accès et un accroissement du nombre de structures pédagogiques (institutions publiques et privées, structures d’enseignement à distance).

À l’échelle internationale, s’est affirmée la prééminence de l’économie du savoir,faisant des établissements d’enseignement supérieur des supports majeurs du développement intégral. L’internationalisation de l’enseignement supérieur, ainsi que l’utilisation des nouvelles technologies, les défis de la compétitivité, l’offre de nouveaux produits et services, l’employabilité des diplômés,associés à l’insuffisance du financement et la massification des cohortes, tout cela appelle des transformations structurelles du secteur. Le Sénégal s’y est engagé résolument avec la convocation de la Concertation nationale sur l’avenir de l’enseignement supérieur suivi du Conseil présidentiel qui a pris onze décisions qui servent de boussole à la réforme en cours. La République populaire de Chine s’est positionnée parmi les premiers pays à soutenir ces réformes.

En 2017, l’institut Confucius de l’UCAD a ouvert une formation en agriculture.

Institut Confucius de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.

Évolution du nombre d’étudiants de l’institut Confucius de l’UCAD depuis 2013

L’institut Confucius de l’UCAD est né de ce positionnement. L’idée de sa création a été lancée lors de la visite du précédent Président chinois Hu Jintao en 2009. Un accord est signé dans ce sens en mars 2011.Les travaux de construction de l’immeuble devant l’abriter ont démarré en fin 2012.L’institut a ouvert ses portes en 2013, avec un hébergement provisoire dans les locaux de l’École normale supérieure d’enseignement technique et professionnel de l’UCAD. L’immeuble propre de l’institut a été réceptionné le 3 février 2016, pour un coût global de près 1 milliard de francs CFA.

L’UCAD a ainsi le privilège d’abriter le 323einstitut Confucius à travers le monde, après le premier créé à Séoul (Corée du Sud) le 21 novembre 2004. C’est l’un des premiers immeubles du genre édifié en Afrique avec financement de la République populaire de Chine, la règle commune étant la prise en charge de la construction par le pays hôte.

Un enthousiasme indéniable

Le campus de l’UCAD rayonne de la beauté de l’architecture du bâtiment et de sa décoration. L’institut Confucius a aussi une plasticité et une fonctionnalité qui lui permettent d’accueillir plusieurs modules d’enseignement de l’histoire, d’esthétique, de médecine ou des arts décoratifs. L’enseignement de la langue chinoise est la mission principale de l’institut Confucius. Cet enseignement suscite un grand enthousiasme auprès des étudiants,des professionnels ou des simples particuliers. L’UCAD est aujourd’hui familiarisée avec les spectacles de danses, de chansons et de chorégraphies et les opéras des troupes chinoises de renommée internationale. Tout ce monde y trouve une opportunité de découvrir la Chine millénaire avec l’exubérance de sa riche culture. C’est aussi un puissant ressort pour renforcer l’amitié et la compréhension mutuelle entre nos deux pays.

L’offre de l’institut Confucius se diversifie avec l’organisation de conférences, de colloques de tous les horizons académiques et des formations spécifiques pour le monde de l’entreprise. L’institut se distingue surtout par un accent particulier sur l’enseignement professionnel, pour mieux servir les besoins du Sénégal, en ressources humaines de qualité. L’institut Confucius de l’UCAD présente une flexibilité opérationnelle qui le rend propre à remédier aux insuffisances des structures académiques classiques.Notamment, le cadre technique de l’institut est parfaitement conforme aux besoins d’une formation professionnelle et répond aux besoins de compétences formulées par les entreprises chinoises.

En effet, l’approche de l’institut Confucius de l’UCAD consiste à associer à l’enseignement de la langue et de la culture chinoise,des compétences pratiques et techniques qui donnent aux apprenants des aptitudes et des qualifications à valoriser immédiatement dans les entreprises. Ainsi, le renforcement des capacités et des compétences des travailleurs est un champ privilégié de son curriculum. Après une enquête auprès des entreprises chinoises, l’institut Confucius a opté en priorité pour la filière d’auxiliaires d’entreprise. Cette option permet de donner une qualification facilitant l’insertion immédiate en entreprise ou l’auto-emploi.

La solidarité semble être le maître mot d’une coopération qui comptabilise des décennies d’un partenariat à l’impact bien visible dans les différents secteurs de notre éducation nationale.

Cette filière est composée de modules de comptabilité générale, de législation comparée, de gestion financière, de bureautique et d’informatique de gestion, de communication et de gestion des ressources humaines.

En 2017, l’institut Confucius a ouvert une formation en agriculture. Le programme mis en place a débuté avec un effectif de 200 candidats dont une première cohorte de 100 étudiants titulaires de licence qui a commencé avec enthousiasme une formation en agropreneuriat comprenant cinq volets, soit une formation pilote, une préparation pour l’environnement relatif à la législation foncière, les besoins du marché, et la faisabilité technique, un partenariat avec les mairies pour l’acquisition de terres de culture, un accompagnement logistique et financier des jeunes et gestion de projets, un encadrement technique dans la gestion des cultures, la commercialisation et la distribution.

Cette formation ouvre l’horizon d’une coopération qui encourage le retour à la terre par le développement de l’entreprenariat. Elle ambitionne d’utiliser les nouvelles technologies dans la gestion et la mise en œuvre de fermes du futur. Elle intègre aussi des modules de gestion du patrimoine. Au moment où le Président Xi Jinping rend visite au Sénégal, ce sont donc des milliers d’étudiants sénégalais qui bénéficient de l’institut Confucius et partagent le rêve chinois en faveur d’une plus grande contribution à la paix et au développement de l’humanité. CA